Par Élodie Messéant

Selon la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), le nombre de ventes de logement neufs aurait chuté de 24 % en 2022. Du fait de la remontée des taux d’intérêt et de la baisse des prêts immobiliers, la France est le premier pays européen à connaître une baisse des prix (-0,5 % au premier trimestre 2023, contre +0,4 % en Allemagne, +0,2 % en Italie ou +0,9 % en Belgique). Selon la Banque de France, le nombre de crédits accordés aux particuliers a chuté de 32 % entre février 2022 et février 2023. En parallèle, la construction de logements devrait diminuer de 30 à 40 % cette année, alors même que le nombre de ménages en attente d’un logement social explose (2,3 millions au total, soit 100 000 de plus par rapport à 2022).

Ne nous méprenons pas : la remontée des taux d’intérêt n’est pas la cause principale de la raréfaction de l’offre immobilière. L’UE aggrave aussi la situation avec sa réglementation environnementale sur les bâtiments neufs. Le dernier exemple en date est le réglement RE2020, dont l’objectif est de “poursuivre l’amélioration de la performance énergétique et la baisse des consommations des bâtiments neufs.” S’il a entraîné un afflux de demandes de permis fin 2021, il ne s’agissait que d’un mouvement d’anticipation avant son entrée en vigueur en 2022. En pratique, la RE2020 vise à faire disparaître l’usage d’énergies fossiles pour le chauffage, et impose des seuils d’émissions de gaz à effet de serre dès la phase de conception des bâtiments. Selon Alain Tur, président du promoteur immobilier AST Groupe, les surcoûts de cette réglementation oscille entre 5 % et 8 % en fonction de la taille et de l’architecture des bâtiments, ce qui se répercute sur le prix des logements neufs.

Les contraintes ne s’arrêtent pas au stade de la construction des logements. Les petits propriétaires doivent s’adapter à toujours plus d’obstacles pour louer leurs biens. Il suffit de mentionner le diagnostic de performance énergétique (DPE), introduit en 2006, qui fait suite à une directive européenne du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments. Ce dispositif classe les logements selon leur consommation énergétique de la lettre A à G. L’objectif du gouvernement est d’atteindre un parc immobilier de catégorie A ou B d’ici 2050 pour se conformer à la réglementation européenne. Problème : à l’heure actuelle, cette note ne concerne que 5 % des logements. Le niveau d’arbitraire est tel que les méthodes de calcul du DPE changent régulièrement. Depuis la dernière modification en 2021, le groupe SeLoger a ainsi constaté une hausse mécanique des logements classés F ou G, appelés “passoires thermiques”. De nombreux propriétaires ne peuvent déjà plus réaliser de plus-value malgré un investissement immobilier souvent conséquent, puisque les logements dont la consommation énergétique dépasse 450 kWh par m² sont interdits à la location depuis le 1er janvier.

Bien sûr, l’État a pensé à tout : grâce aux subventions MaPrimeRénov’, les bailleurs auront la chance de bénéficier d’une aide publique pour rénover leur maison individuelle ou leur appartement en habitat collectif. L’Agence nationale de l’Habitat (Anah) revendique ainsi plus de 718 000 logements rénovés en 2022 pour un montant de 3,4 milliards d’euros. Pour atténuer les conséquences néfastes des réglementations sur les “passoires thermiques”, l’État est donc contraint de distribuer des subventions pour une politique de rénovation énergétique aussi coûteuse que dangereuse pour l’accès au logement. Il existe pourtant une alternative à l’approche dirigiste et autoritaire de l’UE. Dans une situation de marché libre et concurrentiel, rien n’empêche aux locataires et particuliers de s’associer librement, et d’exiger des méthodes d’évaluations de la consommation énergétique des logements. Ils pourraient non seulement bénéficier d’une offre plus abondante sur un marché moins tendu, mais aussi inciter les propriétaires à rénover leurs biens pour répondre à leurs exigences légitimes.